Dans le climat de clivage politique au Burkina, toute idée et toute recherche de compromis pour la cohésion sociale et le renforcement de la démocratie sont des démarches à encourager. Ainsi, un groupe de 8 partis politiques ont convenu d’un Protocole d’accord politique(PAP) dans l’optique d’explorer des champs d’engagement moins conflictuels et plus indiqués, pour ouvrir la transition sur un processus d’institutionnalisation plus protégé, plus pacifié et plus solide. C’est ce qui ressort dans leur manifeste du 25 juillet 2015.
MANIFESTE DES PARTIS SIGNATAIRES
DU PROTOCOLE D’ACCORD POLITIQUE (PAP)
Dans le combat que se livrent actuellement les forces premières de l’ancien régime et de l’insurrection, le pays encourt, entre autres risques, celui de l’enfermement dans des surenchères politiques sinon politiciennes, qui peuvent donner plus d’amplitude à la sourde violence ambiante que nous vivons, au lieu de nous en délivrer.
Les partis signataires du Protocole d’Accord Politique, tout en assumant leur part d’héritage (sous bénéfice inventaire), voudraient tirer la sonnette d’alarme et démontrer par des analyses et actions circonstanciées, qu’il existe des champs d’engagement moins conflictuels et plus indiqués pour ouvrir la transition sur un processus d’institutionnalisation plus protégé, plus pacifié et plus solide .
Leur conviction est qu’entre les deux opinions antagoniques et apparemment inconciliables, il y’a de la place pour une troisième plus indexée sur des priorités insuffisamment prises en compte de part et d’autre.
Le pouvoir de l’ancien régime a pour lui d’avoir, pendant qu’il était en responsabilité, permis au pays d’asseoir sur le lit de la paix une croissance durable et su préparer l’émergence de cette classe moyenne industrieuse et ambitieuse, dont on ne peut contester le rôle dans le dynamisme de notre économie . Mais
chaque montagne ayant sa vallée, le régime déchu a aussi commis des péchés de gouvernance qui ont leur part contributive dans la survenance de sa fin brutale.
Les signataires du protocole d’un autre côté ne répudient pas sans partage les causes qui expliquent l’insurrection, nombre d’entre eux en ont été d’ailleurs des précurseurs dénonciateurs. Ce qu’ils critiquent c’est la volonté de convertir une lutte pour des valeurs d’ouverture, de partage, de participation démocratique, en une lutte pour l’exclusion, le bannissement politique et l’apartheid électoral.
La volonté des signataires du protocole n’est pas de renvoyer sans appel les uns et les autres dos à dos . Leur conviction est qu’il faut plus tenir la bride courte aux impatiences électorales et politiques, pour s’intéresser d’avantage à ces chantiers laissés quasiment en friche et qui risquent si on n’y prend garde, d’hypothéquer les jours d’après transition.
À cet égard, ils ont particulièrement relevé les questions liées à la sécurité collective en général et plus particulièrement à celles physiques en relation avec les convoitises terroristes que pourraient encourager la perte grandissante de l’autorité de l’Etat et le déclin progressif des valeurs républicaines. Ils ont soulevé des interrogations au sujet des menaces sur la cohésion nationale et sociale, sur la tolérance religieuse et ethnique, et des conséquences de la fracture affiliative entre burkinabés de l’intérieur et ceux de l’extérieur.
En prendre conscience aujourd’hui et travailler préventivement et ensemble, à en amortir les effets futurs est une tâche aussi exaltante que la lutte sans merci pour la seule conquête du pouvoir, construite de surcroît sur l’égotisme politique, la chasse aux sorcières.
Il y’a, au demeurant, face notamment à la morosité économique incontestable dans laquelle nous vivons, cette espèce de lassitude rampante que l’on sent de plus en plus dans certaines couches sociales au sujet de ces joutes électoralistes et politiques, improductives, lassitude attestant par ailleurs d’une vacance d’offre à combler, qui nous interpelle d’autant plus si nous voulons lever les gages sur l’avenir.
Les signataires du protocole ambitionnent donc, à juste titre, de combler ce vide, de proposer la construction d’un futur qui intègre la prise de conscience de l’illusion d’une gouvernance responsable et durable, bâtie sur la méconnaissance des enjeux collectifs qui forcent à leur résolution avec la contribution de toutes les filles et tous les fils du Burkina Faso.
Ouagadougou le 25 juillet 2015
PROTOCOLE D’ACCORD POLITIQUE
Les partis politiques signataires du présent acte ont arrêté et convenu ce qui suit :
- MOTIFS DE L’ACCORD
Les partis politiques signataires du présent accord s’apprêtent à participer aux élections du 11 octobre 2015.
Convaincus que l’union fait la force et au regard de l’environnement politique caractérisé par la multiplicité des acteurs, ils ont convenu de constituer une alliance politique.
- CONTENU DE L’ACCORD
Le présent accord met en place un cadre de collaboration et d’action concertée des partis signataires en vue de mener des actions communes durant et après les prochaines élections.
La collaboration concerne les élections présidentielles, législatives et municipales à venir. Elle n’a pas d’incidence sur les organes dirigeants des formations politiques signataires, lesquelles gardent leurs attributs d’indépendance et d’autonomie.
Les partis poursuivront les concertations dans la perspective d’autres objectifs.
- ETENDUE DE L’ACCORD
Les partis politiques signataires s’engagent à mettre en œuvre des stratégies communes et concertées, notamment pour :
- L’élection présidentielle : les partis signataires œuvreront à porter leur choix sur un candidat unique.
- Les élections législatives : les partis signataires s’engagent à adopter une stratégie de liste concertée dans toutes les circonscriptions électorales où ils présentent des candidats au regard de la carte électorale et des forces en présence.
- Les élections municipales : la collaboration des partis signataires se fera sur le même schéma que pour les élections législatives.
- COLLABORATION POST-ELECTORALE
A l’issue des élections, les signataires s’engagent à maintenir leur collaboration en créant entre eux un groupe législatif et un groupe municipal.
- MOYENS D’ACTION
- Moyens d’action humains
Les partis signataires se portent une assistance dans le domaine de l’information et de la logistique sur le terrain au cours des élections.
- Moyens financiers
Les partis signataires se donnent chacun ses moyens de participer aux élections.
En outre, ils œuvrent ensemble à doter les partis en alliance de ressources financières provenant d’autres partenaires intéressés.
- ORGANISATION
Une coordination est assurée par l’ensemble des présidents des partis signataires.
Il sera procédé à la mise en place de coordinations décentralisées.
- ADHESIONS
Tout parti politique qui partage la vision et les aspirations des partis signataires et qui en fait la demande peut en devenir membre.
- ENGAGEMENTS DES SIGNATAIRES
Les partis politiques signataires s’engagent à :
- agir dans le respect des clauses et principes énoncés dans le présent accord ;
- œuvrer ensemble pour atteindre les buts et objectifs communs visés ;
- à appliquer les clauses librement consenties.
- à régler à l’amiable les différends nés de l’exécution.
Ouagadougou, le 25 juillet 2015
PARTIS POLITIQUES SIGNATAIRES
DU PROTOCOLE D’ACCORD POLITIQUE
LES PATRIOTES UNIS POUR LE CHANGEMENT (PUC)
LES FORCES POUR LA DEFENSE DE LA DEMOCRATIE (FDD)
LE FRONT DES MASSES POPULAIRES/DEMOCRATES DU FASO (FMP/DF)
LE FRONT PATRIOTIQUE POUR LE CHANGEMENT (FPC)
LE RASSEMBLEMENT POUR UN SURSAUT REPUBLICAIN (RSR)
L’UNION POUR LA REPUBLIQUE (UPR)
L’UNION NATIONALE POUR LA DEMOCRATIE ET LE DEVELOPPEMENT (UNDD)
L’ACTION SOLIDAIRE POUR LA DEMOCRATIE ET LE DEVELOPPEMENT (ASDD)