Nicolas Sarkozy est en garde à vue depuis le mardi 20 mars 2018 au matin. La justice tient à l’entendre sur le présumé financement libyen de sa campagne de 2007 sur lequel elle enquête depuis 5 ans. Nicolas Sarkozy est le président français qui a permis à la Libye de Kadhafi de sortir de son isolement international. Mais au vu des éléments qui s’accumulent dans ce dossier, difficile de ne pas regarder l’histoire récente des relations entre Paris et Tripoli a l’aune des soupçons de financements illicites.
Il y a d’abord les faits connus : alors que la Libye cherche à revenir dans le concert des Nations, le ministre français de l’Intérieur Nicolas Sarkozy, fait le voyage à Tripoli en 2005, un an après Jacques Chirac.
Ce qui bloque alors la normalisation des relations entre le Guide et la France est l’affaire des infirmières bulgares détenues en Libyedepuis 1999. En mai 2007, Sarkozy est élu président et en juillet, Cécilia Sarkozy et Claude Guéant vont à Tripoli et reviennent avec les infirmières bulgares que Kadhafi a finalement accepté de libérer.
Réception en grande pompe à Paris
En décembre 2007, le Guide est reçu en grande pompe à Paris. Il plante sa tente à l’hôtel Marigny en face de l’Elysée. L’Elysée qui annonce 10 milliards d’euros de contrats signés avec la Libye que Mouammar Kadhafi n’honorera finalement pas.
Puis vient la guerre en 2011. Paris, Londres et Washington, sous mandat de l’ONU, prennent le parti des insurgés libyens à partir du 19 mars. Trois jours plus tôt le fils du Guide, Saïf al-Islam Kadhafi, accuse pour la première fois le président français d’avoir reçu de l’argent libyen. En octobre, Mouammar Kadhafi et un de ses fils sont tués à Syrte.
En 2012, Béchir Saleh, le grand argentier du régime libyen est exfiltré de Libye vers la France, puis, entre les deux tours de la présidentielle française, de la France vers le Niger puis l’Afrique du Sud ou il est toujours exilé.
Mediapart fait éclater l’affaire
L’affaire éclate ensuite en 2012 avec la publication par Mediapart d’une note attribuée à un dignitaire libyen, Moussa Koussa, accréditant la thèse d’un financement libyen de la campagne de Sarkozy en 2007.
En avril 2013, la justice française ouvre une enquête. Elle s’intéresse notamment au cas de Claude Guéant, ancien secrétaire général de l’Elysée, qui peine à justifier l’origine des 500 000 euros qui lui ont permis d’acheter un appartement à Paris en 2008.
Elle s’intéresse aussi au rôle qu’ont pu jouer les intermédiaires présumés Alexandre Djouhri et Ziad Takieddine. Ce dernier dit avoir transporté et remis à Nicolas Sarkozy fin 2006 – début 2007, trois valises contenant au total cinq millions d’euros, confirmant les propos tenus en 2012 par Abdallah Senoussi, l’ancien chef des renseignements militaires du régime libyen.
Djouhri et Takieddine, deux intermédiaires sulfureux
Par ailleurs, la justice a mis la main sur les carnets de l’ancien ministre libyen du Pétrole, Chokri Ghanem, mort en 2012 dans des circonstances troubles. Des carnets qui mentionnent l’existence de versements d’argents à destination de Nicolas Sarkozy.
En 2016, Takieddine est mis en examen. Quant à Alexandre Djourhi, la justice s’intéresse à une villa sur la Côte d’Azur qu’il a vendu en 2008 au fonds souverain libyen alors dirigé par Béchir Saleh. Une vente conclue pour plus de deux fois le prix estimé. Djouhri est arrêté à Londres en janvier dernier, et assigné à résidence, en attente d’une possible extradition vers la France.