Le président américain Donald Trump a annoncé le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris. Une des conséquences immédiatement mesurable de ce retrait, c’est un déficit de deux milliards de dollars du « fond vert » qui doit permettre aux pays les plus vulnérables de mettre en place des projets pour combattre les effets des changements climatiques.
A ce jour, seul un des trois milliards de dollars promis par Barack Obama a déjà été versé au « fond vert ». Les deux milliards devraient donc manquer pour les initiatives des pays les plus vulnérables.
Pour Seyni Nafo, président du groupe des négociateurs africains sur le climat, et ambassadeur climat pour le Mali, les répercussions négatives ne sont pas que financières : « Ceci n’est pas une surprise, mais c’est un coup dur pour au moins trois raisons. La première déjà, c’est quand même un coup dur pour la science et la communauté scientifique de manière générale. Le dérèglement du climat est une réalité et c’est une réalité qui concerne le monde et la planète. Deuxièmement, c’est un coup dur pour le multilatéralisme et la communauté internationale puisque c’est sur la base de cette première réalité du dérèglement climatique en tant que phénomène global que la communauté internationale s’est mobilisée pour négocier et signer l’Accord à Paris, le ratifier dans des délais sans précédent. Troisièmement, c’est un coup dur pour les pays vulnérables que nous représentons qui n’ont pas créé ce phénomène, qui doivent faire face à d’autres défis tels que la lutte contre la pauvreté et l’accès au développement durable. Donc, c’est un coup dur pour au moins ces trois raisons. C’est une gifle en fait ».
Même sentiment d’inquiétude pour Haïdar el-Ali. Pour l’ancien ministre de l’Environnement et secrétaire général de la Fédération démocratique des écologistes du Sénégal (FDES), le retrait des Etats-Unis signe probablement l’arrêt de mort de l’Accord de Paris : « En Afrique, on a très peu été soutenus pour l’environnement. Moi, j’avais dit au président Obama, quand il m’a serré la main, que seul un plan Marshall pour l’environnement en Afrique, j’aurais été séduit si cette question capitale était prise en compte. Mais voilà que Trump sort de l’Accord. Vingt ans de négociations pour rien parce que, s’il sort de l’Accord, tout le monde le suit pour sortir parce que les Accords de Paris, c’est une contrainte pour les pays qui veulent les suivre, une contrainte économique. Cela veut dire que les Etats-Unis s’ils en sortent seront plus concurrentiels économiquement que les autres puisqu’ils n’auront pas ces contraintes. Cela veut dire que les Russes, les Chinois, ils ne vont pas comprendre d’être tout seuls à vouloir suivre les Accords contraignants financièrement alors que les Etats-Unis pollueurs ne suivent pas. Je suis désolé, mais moi je pense que tout cela va se casser la gueule. On va se retrouver à la COP 100, tous les scientifiques seront autour d’un seul arbre qui reste. Ils vont dire alors on le coupe maintenant ou on attend la COP 101. C’est tout ce qui va se passer. Pour, moi c’est la mort de l’Accord de Paris ».
Et pour l’ancien ministre, cette sortie n’est pas une surprise, mais il est très amer après l’annonce de ce retrait américain : « On a mis une vingtaine d’années pour trouver un accord. Et voilà qu’en cinq minutes, le président américain veut en sortir. C’est inquiétant parce que la planète souffre des dérives de notre société dans sa surconsommation, surproduction. L’Afrique, le continent pauvre, paie les pots cassés de ce réchauffement climatique. Et voilà que l’entreprise américaine, parce qu’en fait il s’agit d’une grosse entreprise multinationale qui s’en fout un peu de la planète, elle l’a longtemps prouvé. Elle n’est pas dans la CPI [Cour pénale internationale]. Les Etats-Unis c’est le plus grand pollueur avec les Chinois bien sûr maintenant. Donc on est inquiets. Maintenant que faire ? C’est dommage pour la planète, c’est dommage pour l’humanité. Cela va surtout causer que, du fait que nos pays sont pillés par des multinationales, pillés par des mafieux chinois et autres, au niveau halieutique, au niveau minier, au niveau forestier. Nos enfants n’ont plus le choix que de prendre la pirogue pour aller vous rejoindre là-bas dans vos soi-disant eldorados. Donc ça va donner que les pirogues vont augmenter, le ventre de l’Atlantique va se nourrir et nos enfants vont en souffrir encore ».
Source:rfi.fr
06 Juin 2017