Commentaire
La problématique de la réconciliation nationale au Burkina Faso qui semble demeurer longtemps un serpent de mer, commence à livrer certains secrets.
La campagne électorale du scrutin couplé présidentiel et législatif du 22 novembre 2020, a permis à des langues de se délier, pour révéler quelques secrets liés à la question du retour des exilés politiques burkinabè dans leur pays. C’est pendant cette campagne, que le candidat –président Roch Marc Christian Kaboré a déclaré , qu’après sa réélection, il s’engagerait pour la concrétisation de la réconciliation nationale durant le 1er semestre de 2021.Ceux qui espéraient ainsi un boulevard pour le pardon général et l’amnistie pour les illustres exilés dont l’ex président Blaise Compaoré ,ont été vite désillusionnés .En effet, en professant qu’il n’est pas opposé au retour de Blaise Compaoré et autres exilés, le président Kaboré précise par la suite, que ceux d’entre eux qui ont affaire à la justice , devront y faire face.
Pas d’humiliation pour anciens dignitaires exilés du Burkina
En dévoilant progressivement les contours de ses intentions de réconciliation nationale, le président Kaboré a laissé entendre, que des personnalités qui ont dirigé le Burkina, méritent le respect dû à leur rang. A leur retour, il fait savoir, qu’ils seront surveillés. Une telle déclaration, s’avère antinomique des supputations selon lesquelles, d’anciens chefs d’Etat comme Blaise Compaoré et Yacouba Isaac Zida , seraient arrêtés dès leur arrivée à l’aéroport international de Ouagadougou et mis à la disposition de la justice.
Le président Kaboré, visiblement, n’ignore pas la complexité de la problématique de la réconciliation nationale au Burkina Faso. C’est pourquoi, il envisage une sorte d’assises nationales dont, les recommandations consensuelles, devraient permettre d’aboutir à la quête de cohésion nationale. Même s’il persiste sur le triptyque Vérité-Justice-Réconciliation, le chef de l’Etat, ne pourrait pas être le seul maître dans la didactique de la réconciliation.
Parmi les exilés politiques, Blaise Compaoré et Yacouba Isaac Zida, militaires de formation, constituent les 2 figures emblématiques. Ce sont des gens qui bénéficient toujours d’une certaine popularité au Burkina. Il importe pour les autorités, de ne pas faire preuve d’une amnésie. Il faut se remémorer les procès des Tribunaux Populaires de la Révolution(T.P.R) où des populations ont magnifié l’innocence de l’ex président, le général Aboubacar Sangoulé Lamizana, ce qui a abouti à son acquittement. Certes, Lamizana n’était pas impliqué dans des crimes de sang.
Par contre, l’aboutissement de la réconciliation nationale suit un chemin sinueux, qu’il faudrait franchir avec beaucoup de tact et de raison, sans excès de passion et de sentiment de règlements de comptes .Sinon, le risque est grand de produire l’effet contraire et l’éternel recommencement. La forme idoine de jugement de ce passif, passe par la justice transitionnelle où il y aura vérité, justice réparatrice et réconciliation. Le cas contraire, une justice classique ébranlera non seulement des dignitaires du régime déçu de Blaise Compaoré, mais aussi ceux du régime Roch Kaboré et alliés , dont certains tentent de se protéger et de jouer aux saints. En effet, les violences politiques de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, exigent que la part des responsabilités soit située de part et d’autre. Entre ceux qui ont eu l’intention de modifier l’article 37 de la constitution pour se maintenir anormalement au pouvoir et des insurgés pyromanes, qui ont mis le pays à feu et à sang. Quand des insurgés disent « si Blaise Compaoré revient au Burkina, où allons-nous rentrer ? Cela prouve que certains insurgés se sentent coupables de faits répréhensibles.
Il faut aller au-delà des mesquineries politiciennes et du narcissisme, pour une vision holistique de la noblesse de la réconciliation, dans l’intérêt général des citoyens et de la nation.
Jean KY
Laborpresse.net 04 Décembre 2020