Des agents électoraux procèdent au dépouillement dans un bureau de vote de Bouaké, le 13 octobre 2018. © ISSOUF SANOGO / AFP

Présidentielle en Côte d’Ivoire: l’opposition appelle à «l’ouverture d’une transition civile»

Au lendemain du scrutin présidentiel en Côte d’Ivoire, l’opposition annonce qu’elle ne reconnaît pas cette élection et constate la fin du mandat du président Ouattara. En réaction, le directeur exécutif du RHDP appelle le gouvernement à la fermeté.

Avant l’annonce des résultats partiels, qui devrait intervenir dans les prochaines heures, le porte-porte de la coalition d’opposition, Pascal Affi N’Guessan, a lu une déclaration devant une nuée de journalistes nationaux et internationaux, depuis la résidence du président du PDCI, Henri Konan Bédié. Aux côtés d’Affi N’Guessan, d’autres présidents de partis, notamment Albert Mabri Toikeusse, dont le dossier de candidature avait été jugé irrecevable par le Conseil constitutionnel. En revanche, Henri Konan Bédié, lui, n’a pas assisté à la lecture du communiqué. Les journalistes l’ont cependant aperçu faire un geste de la main quelques minutes plus tôt, rapporte notre correspondant à Abidjan, François Hume-Ferkatadji.

Sans surprise, l’opposition annonce ne pas « reconnaître l’élection présidentielle ». Par conséquent, elle « constate la fin du mandat du président Ouattara » et « appelle à l’ouverture d’une transition civile afin de créer les conditions d’une élection présidentielle juste et transparente ».

Cette transition, l’opposition l’appelle en fait de ses vœux depuis des semaines. L’objectif de la désobéissance civile, lancée en septembre, visait à obtenir cette transition politique pour remettre à plat l’environnement électoral et discuter de mesures de réconciliation. Pourtant, samedi, Simone Gbagbo estimait pour sa part qu’il fallait « se donner les moyens de mettre en place un gouvernement de transition », une proposition approuvée dans la soirée par Guillaume Soro et son mouvement GPS. Or, dans sa déclaration commune, l’opposition ne dit pas qu’elle va mettre en place un gouvernement mais appelle à une transition. Une façon d’impliquer un acteur extérieur ou la communauté internationale, puisqu’elle ne reconnaît plus le président sortant Alassanne Ouattara et donc qu’elle ne peut plus négocier avec lui.

Dans sa déclaration, l’opposition a aussi appelé à « la mobilisation générale » pour faire « barrage à la dictature du président Alassane Ouattara », sans toutefois donner plus d’informations ou de précisions sur les modalités de cette mobilisation.Le blocage politique est donc loin d’être réglé malgré les troubles importants qui ont secoué le pays ce samedi. L’opposition déplore d’ailleurs désormais 30 personnes victimes pour la seule journée d’hier. De son côté, le gouvernement n’a donné aucun bilan officiel à ce jour. L’opposition a avancé d’autres chiffres : le taux de participation notamment, qu’elle estime à moins de 10%.

Le porte-parole de l'opposition ivoirienne, Pascal Affi N'Guessan, lors de sa conférence de presse à Abidjan, le 1er novembre 2020.

Le porte-parole de l’opposition ivoirienne, Pascal Affi N’Guessan, lors de sa conférence de presse à Abidjan, le 1er novembre 2020. RFI/Romain Ferré

Adama Bictogo appelle le gouvernement à la fermeté

Adama Bictogo a réagi ce soir aux propos de l’opposition, rapporte notre correspondant à Abidjan, Sidi Yansané. Le directeur exécutif du RHDP a dirigé ľessentiel de sa déclaration contre ľopposition, citant à plusieurs reprises Pascal Affi N’Guessan, le candidat du FPI, l’ex-première dame Simone Gbagbo et Maurice Kakou Guikahué, le secrétaire du PDCI d’Henri Konan Bédié.

Adama Bictogo dénonce leurs propos et les accuse ďêtre responsables des débordements ďhier, ďavoir manipulé et armé des jeunes. Pour lui, les opposants « se mettent en marge des lois de la Constitution » en menaçant les institutions. Il demande au gouvernement de « faire preuve de fermeté » pour assurer la protection des Ivoiriens et « met en garde » directement les opposants.

De multiples incidents

L’organisation de la société civile Indigo a, par ailleurs, publié dans l’après-midi un communiqué portant sur l’ensemble de la journée d’hier. L’ONG, qui avait un millier d’observateurs sur le terrain, indique que 23% des bureaux de vote sont restés fermés toute la journée. Soit plus de 5 000 bureaux qui n’ont pas ouvert en raison de menaces sur les agents de la CEI, d’attaques contre des centres de vote, de destruction du matériel, ou bien de barricades. Parmi les districts les plus touchés, Goh Djiboua, Lacs, Lagunes, Sassandra- Marahoué, Yamassoukro et la Vallée de la Bandama.

L’organisation a ainsi enregistré 391 incidents, indique notre envoyée spéciale, Alexandra Brangeon. Il s’agit de violences, d’intimidations, de suspicions de bourrages d’urnes, notamment à Abobo, Tiébissou, Cocody Sassandra, Bouaké, Yamoussoukro. Mais aussi de personnes ayant pu voter dans un bureau alors qu’elles ne figuraient pas sur les listes électorales et n’avaient pas de document requis, sans toutefois en préciser le nombre. Indigo rapporte également des affrontements communautaires avec pertes de vie humaine. Là non plus, sans donner de chiffres.

L’organisation conclut que le déroulement du vote a été émaillé par des incidents sécuritaires majeurs. Et que tous ces incidents n’ont pas permis « l’expression massive et sereine du suffrage pour une partie importante de la population. »

Dans un communiqué, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile se félicite ce dimanche soir du bon déroulement du scrutin sur toute l’étendue du territoire national et dans la diaspora, malgré « des incidents relevés dans un nombre limité de localités ». Le gouvernement indique sa « détermination à garantir la paix et la sécurité sur l’ensemble du territoire ».

Source: rfi.fr

02 Novembre 2020

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